Nous qui reprochons à d'autres de ne pas respecter leur patrimoine, il y a encore peu, non seulement nous ne nous en inquiétions pas, mais, souvent, utilisions les monuments du passé comme carrières, ou comme lieux de travail, d'habitation, de culte, au risque de nombreuses dégradations, quand nous ne les avons pas purement et simplement cédés.
Avignon, le Palais des Papes au début du XIXe – une gravure de Lemaire en montre l'état de délabrement - Wikipedia
Si aujourd'hui nous consacrons au Patrimoine (dans un sens plus large que la seule architecture) deux journées par an, et tout au long de l'année du temps et de l'énergie pour lui rendre visite, le restaurer, en parler, il ne faut pas oublier que nous devons notre intérêt et notre respect pour cet héritage à des hommes comme Victor Hugo, Prosper Mérimée ou Eugène Viollet le Duc, et grâce à eux, à la notion de « Monument historique ». Depuis la notion de Patrimoine s'est étendue, et aujourd'hui on parle aussi de patrimoine mondial, de patrimoine immatériel, et l'UNESCO veille à sa sauvegarde. Cela ne suffit pas toujours, mais au moins l'idée chemine et avec elle l'éducation, c'est par elle que l'intérêt s'éveille.
Pour démontrer le peu d'intérêt que nous portions au patrimoine, et particulièrement au patrimoine architectural, il y a des exemples célèbres, comme les cloîtres du Sud Ouest, le Palais des Papes d'Avignon, la Maison carrée de Nîmes, etc.
Un temple gallo-romain transformé en église, à Vienne dans l'Isère.
On le sait aussi, les guerres de Religion, la Révolution, firent beaucoup de dégâts, et notamment la vente d'édifices comme biens nationaux. Ajouté à cela, la facilité à trouver là des pierres pour la construction, comme ici à Vaison la Romaine où les ruines antiques fournissent des sous bassement pour l'église romane ND de Nazareth,
Nd de Nazareth - Romanes.com
Ici, nous pourrions nous croire dans les Pyrénées, mais non, nous sommes à New-York, au « Cloisters », le musée des cloîtres, dans l'île de Manhattan, et c'est une annexe du MET. Cinq cloîtres sont reconstitués à partir la collection d'art médiéval rachetée en 1925 par John D. Rockefeller au sculpteur George Grey Barnard. Parmi eux les cloitres de Saint-Michel de Cuxa et de Saint-Guilhem le Désert, regroupent des œuvres venues d'autres lieux. Wikipedia
L'abbaye Saint Michel de Cuxa, dans les Pyrénées-Orientales a été vendue comme bien national, utilisée par des exploitations industrielles et agricoles, pillée, puis finalement, le cloître est vendu chapiteau par chapiteau, comme la fontaine, qui elle, est visible au Museum of Art de Philadelphie. L'abbaye de Saint-Guilhem le Désert est elle aussi vendue comme bien national, et si l'église devient la paroisse du village, le monastère est partagé entre des artisans et le cloître sert de carrière à un maçon. Bien que l'édifice soit classé en 1840, en 1906, un ensemble d'éléments sculptés du cloître est vendu au collectionneur George Grey.
Deux chapiteaux du cloître de Sainte Foy de Conques
Sur la route de Compostelle, Sainte Foy de Conques est une étape importante, depuis l'origine du pèlerinage. Et pourtant, le cloître a été rasé dès le XVIe siècle et a servi de carrière au village lui-même. A droite on peut voir un chapiteau, sans doute de l'ancien cloître, dans le jardin d'une maison.
Et la liste est encore longue de ces églises et abbayes pillées qui ne conservent que peu de vestiges des bâtiments conventuels, des cloîtres en particulier.
Ces édifices abandonnés sont souvent devenus privatifs et réutilisés à des fins d’exploitation, agricole comme l'abbaye cistercienne de Valcroissant, dans la Drôme
Ici, son état des les années 1980 , avant sa restauration
L'abbaye cistercienne de Valcroissant, près de Die. aujourd'hui, a été restaurée par ses propriétaires actuels avec l'aide d'une association, et abrite un gîte d'étape sur un GR, elle a été transformée en ferme et a perdu son cloître, la nef et les bas-cotés de l’église, l'aile des convers.
Pour plus d'information, le site de l'abbaye de Valcroissant
Un exemple plus confidentiel, la chapelle du Miracle à Avignon,
En haut, l'intérieur de la chapelle dans son état actuel, pour d'autres détails, voir mon article sur mon autre blog, « Avignon états et lieux ». Elle a subi des transformations, les décorations, dont celles des bases des ogives, vendues, elle a abrité jusqu'à sa restauration très intelligente, un fabriquant de ponts et tout son matériel. En bas on peut voir des traces de l'ancien cloître dans des jardins voisins. C'est toujours un lieu privatif, mais il est possible de la visiter car elle sert d'écrin à des expositions.
Et nous le savons, la conservation du patrimoine, qu'il soit religieux (les municipalités n'ayant pas toujours les moyens d'entretenir les églises paroissiales), ou laïc, en particulier les châteaux ; pose problème. La Mission patrimoine aide certains de ces témoins à rester en vie. https://www.missionbern.fr/
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